ATD-Quart Monde vient de publier un livre à mettre entre toutes les mains. Le baromètre Ipsos/secours populaire de ce mois confirme que "la pauvreté se fabrique au féminin". Le Capital au XXIe siècle, de Thomas Piketty bouleverse la réflexion sur les inégalités. Sa solution : taxer le capital. Entretien dans Télérama.
ATD-Quart Monde vient de publier avec l’aide financière d’un trentaine de partenaires – dont la FSU- un petit livre à mettre entre toutes les mains.
"En finir avec les idées fausses sur les pauvres et sur la pauvreté", le titre exprime bien ce qu’est le projet. Dans son introduction Bruno Tardieu, délégué général de l’association, donne le sens de la démarche : nous vivons avec des stéréotypes et le seul moyen véritable de les dépasser est d’avoir une connaissance intime et personnelle des autres – c’est le sens fondamental de l’engagement de l’association- mais faire reculer les idées reçues est également un moyen de dépasser ces stéréotypes et de faciliter le contact et la prise en compte de l’autre. Mais aussi de mener des combats. D’où le livre.
Les auteurs ont sélectionné 88 idées reçues, regroupées en chapitres : pour chacune un court développement, souvent une page, clair et très pédagogique, étayé systématiquement par des données officielles, des rapports ou des recherches françaises ou étrangères. Deux catégories de réponses montrent le souhait des auteurs d’éviter de leur côté les démonstrations simplistes ou caricaturales : tantôt le titre est "faux", tantôt un "pas si simple" plus nuancé. Et le texte est ponctué ironiquement de citations de penseurs ou de politiques des XVIIIeme et XIXeme siecles illustrant le discours des débuts du libéralisme sur les pauvres, qui mêle condescendance, mépris et peur. Inversement quelques témoignages de rencontres avec des personnes en grande pauvreté viennent illustrer ce qui fonde l’engagement d’ATD
Le champ des idées reçues que démonte l’ouvrage est vaste puisque sont abordés les thèmes de l’emploi,de l’immigration, des Roms, des sans abri, de l’école, l’insécurité….il ne se contente pas de traiter des idées fausses sur ce que sont les pauvres mais toute une partie démonte aussi celles qui concernent les solutions ( du style " pour lutter contre l’absentéisme il faut responsabiliser les parents" ou " pour créer des emplois il faut baisser les charges sur les bas salaires")
On peut aussi bien en faire une lecture continue et linéaire que le consulter sur une question particulière.
Derrière ce qui peut sembler un patchwork se dessine un portrait de la grande pauvreté, de sa singularité ( une des idées reçues dénoncées est que tout le monde un jour peut se retrouver dans la grande pauvreté), de la dureté de vie et de l’exclusion qu’elle entraîne. Et apparaît clairement la démonstration que si les pauvres sont victimes d’une forme d’apartheid social, ils ne sont pas des êtres à part : ils ont la même humanité que les autres, les mêmes désirs de réussite scolaire pour leurs enfants ou d’accès à l’emploi pour eux mêmes, les mêmes capacités…ils ne sont pas responsables de leur pauvreté et c’est la société que celle-ci doit interpeler. Ils n’ont pas besoin de commisération condescendante mais de justice et de la possibilité d’exercer véritablement leurs droits. On retrouve ainsi une des idées force d’ATD-Quart Monde qui est que leur expérience de vie leur donne un regard sur le monde et une richesse humaines dont nous pouvons tous profiter.
Ce livre ne s’adresse pas qu’aux militants d’ATD. Il vise le plus large public. C’est un veritable instrument d’education populaire, extrêmement utile pour tous ceux qui militent pour les droits, les services publics, la justice sociale. Mais il serait aussi – et sera si l’on s’en saisit- particulièrement profitable et formateur pour les jeunes collègues, enseignants, fonctionnaires,en formation ou nommés dans des postes où ils sont affontés aux effets de la crise et de la pauvreté.
Gérard Aschieri
Ps : la Fsu dispose d’un certain nombre d’exemplaire au prix de 5 euros. Vous pouvez passer commande soit directement à la Fsu soit par l’intermédiaire de l’Institut de recherches